Deux réfugiées ukrainiennes affirment s’être vues refuser l’accès à un restaurant parisien, en raison de leur nationalité. Larissa et Melisa, mère et fille ukrainiennes, envisagent de porter plainte contre le patron du restaurant « Le Cosy », situé près de Montparnasse dans le 15e arrondissement. Ce lundi, ce dernier aurait refusé de les servir, en scandant un slogan pro Poutine. Originaires d’une petite ville du nord de l’Ukraine, les deux femmes ont été contraintes de quitter leur domicile en août dernier en raison de la guerre dans le pays. Leur avocat, Antoine Giraudet, prépare une plainte pour discrimination.
« Elles sont arrivées en France en août, avec d’importants symptômes post-traumatiques, explique ce dernier. Elles viennent d’arriver à Paris, en septembre, et vivent un événement qu’elles considèrent comme très choquant. » Il affirme que les deux femmes n’ont plus quitté leur centre d’hébergement depuis les évènements de lundi, « si ce n’est pour consulter des personnes qui pourraient les conseiller dans cette affaire ».
« Pas les bienvenues ici »
Mère et Mélissa se sont assises ce lundi à une table du restaurant Le Cosy, aux alentours de 17 heures. « Transies de froid, elles sont directement entrées dans le café et se sont assises », raconte Antoine Giraudet. Quand vient le moment de commander, Melissa demande à la serveuse si l’établissement vend du thé, « puisque ce n’était pas inscrit sur la carte », précise l’avocat. Gentiment, la serveuse répond qu’il suffit de demander.
La situation se tend lorsque Mélissa demande le prix du thé, en précisant « qu’elles sont ukrainiennes et n’ont pas beaucoup de moyens, affirme-t-il. Elle explique qu’elles ne peuvent payer qu’avec les tickets-restaurants fournis par la Croix-Rouge ». Selon le récit de ses clientes, la serveuse se serait directement braquée et aurait refusé de les servir, affirmant qu’elles « n’étaient pas les bienvenues ici ».
Le patron scande « Viva Poutine »
« La fille a voulu partir tout de suite mais la mère, qui estimait qu’il n’était pas poli de partir sans consommer après avoir utilisé les toilettes, a voulu parler au gérant, ajoute Antoine Giraudet. Elle était persuadée qu’il comprendrait mieux la situation. La suite vous la connaissez, elle a été filmée. » Une vidéo montrant le patron de l’établissement les mettre à la porte, en répétant à deux reprises « Viva Poutine », circule effectivement sur les réseaux sociaux.
Interrogé ce mardi par BFMTV, il affirme avoir dit « vive Poutine » après avoir reçu des menaces des deux clientes. Auprès de nos confrères, il a affirmé qu’il « [s]’en fiche que [ses clients] soient Ukrainiens. […] On accepte tout le monde, c’est juste qu’elles n’ont pas voulu consommer et qu’elles ont fait perdre du temps à l’équipe alors que le restaurant était complet. »
Opposition dans les avis Google
L’affaire prend de l’ampleur ce mardi à la suite d’un tweet dénonciateur de Kogutyak Volodymyr, vice-président de l’Union des Ukrainiens de France. En quelques heures, un grand nombre de commentaires sont postés dans les avis du restaurant. « Super propriétaire ! », « Excellent ! Un plaisir ! », assurent une foule de commentaires postés ce mardi, aux alentours de 20 heures. Parmi eux, de nombreux commentaires vantent les mérites du restaurant… Et de la Russie. « Grande Russie – grand Poutine ! », peut-on lire par exemple dans un commentaire en russe. « Le propriétaire du restaurant […] a fait ce qu’il fallait, qu’il a chassé la rage », déclarait hier un autre internaute russe.
Ces derniers peinent néanmoins à dissimuler les autres commentaires, qui dénoncent l’attitude du patron. « Le propriétaire humilie des gens en raison de leur nationalité », « ségrégation pour des motifs politiques et territoriaux » lit-on également, en continuant à scroller. Tandis que les deux versions s’opposent, via commentaires interposés, l’avocat Antoine Giraudet tient à rappeler que « [ses] clientes ne souhaitent pas que les Ukrainiens se fassent justice eux-mêmes ou s’en prennent au patron. Elles souhaitent passer par les autorités compétentes, d’où le dépôt de plainte », qui devrait avoir lieu d’ici ce vendredi.